
Nous étions trois, enfants aux nattes sages, aux cheveux ébouriffés, indomptables et sauvages, et avec les elfes, nous convenions que tel ou tel élan méritait de se presser en jus savoureux, le pur et étincelant rayonnement d’une coupe vermeille et insaisissable, tandis que submergées par les herbes juvéniles, nous pourchassions les papillons multicolores, éprises d’effervescences, l’amour léger des frondaisons, le cœur exultant en des myriades de révérences. Avec les feuilles, nous tressions des couronnes, méticuleuses tâches, flamboiement de nos doigts menus et sages. Je me dressais fière et invaincue tout en haut d’un épicéa et voguais dans le vent courageux, bravant les limites des vues limitées. Nous étions trois, fines et tendues de cotonnade, des fleurs sur les fichus éthérés, des brindilles de soleil sur les lèvres rosées de perles et colliers de jasmin. Je secouais les mains au ciel sans ombrage et ne sachant plus s’il me fallait rester dans le silence de la nuit, tapie dans les rivières d’étoiles, où bien rentrer à moitié ivre de nos escapades. Non, je ne savais plus, s’il me fallait déserter la maison pour m’endormir au plus près de la lune ou s’il fallait obtempérer… J’imaginais des brassées de mondes et visitais les océans impétueux. L’enthousiasme avait parfois l’ampleur des supplices.