L’homme véritable

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Des champs dévastés de ce pays de cocagne,
Quand de l’égoïsme, il n’est aucune guérison,
A peine le leurre devient une factice déraison,
La plupart des gens ont peur de quitter leur bagne,

Ces sombres chimères que l’on survole avec peine,
Eclairé par les preux pèlerins aguerris ;
Nous butinons à la ruche d’où un miel jaillit,
Dont la mémoire subtile trace ses volutes pérennes,

D’avoir libéré de l’espace à notre être,
Voici que le long sentier devient transparent,
Et nous répétons des heures, inlassablement.

Au Silence secret, un lieu nous a fait naître ;
Il a libéré notre âme du rêve de l’ego.
Comment dire ? Nous le comprendrons tous très bientôt !

***

Il est bien vain de cueillir en cet ici-bas ;
Plus l’espace est restreint et plus l’âme cumule :
Des objets, des événements, sans scrupule ;
Cela est tout au plus d’insignifiants gravats.

L’homme qui fait le don de son moi avant la mort,
Est celui qui s’extrait du rêve tentacule,
Des néfastes et impondérés conciliabules,
Allant toujours avec ceux qui se remémorent.

Telle est sa mission : semer en cette vie des graines,
Pour qui sait entendre, voir et se souvenir.
Cet homme a dépassé toutes aspirations vaines,

A tous ces nœuds gémissants qui s’entrelacent,
Il voit sans sourciller l’âpreté des désirs
D’un enfer qui clame : J’en veux encor ! Qui trépasse ?

Conscience

Photographie de Clarence Hudson White

Semé de bruits et de silence, le long d’une colonne,
Chaque vertèbre est une offrande, un livre ouvert.
Semé de regards et des gestes semis d’automne,
Le blanc hiver virevolte au pied d’une fougère.

Semé de langueur et de promenades solitaires,
Chaque souffle est une tige qui fleurit au vent,
Laissant une simple trace au cœur crépusculaire,
L’inframonde a ses étages semés du Vivant.

Quelle reconnaissance, Ô mon âme échevelée !
Dans les poussières semées d’étoiles, toute sa puissance,
Ont fait jaillir les splendeurs de la Quintessence.

Combien de fois, sur les sentiers dépeuplés,
Tu tins l’Ouvrage et le Calame avec constance,
L’encre des rives et des dérives d’une conscience.

Terre

Peinture de Jules Aldolphe Aimé Louis Breton (1827-1906)

Je ne sais plus vivre,
Mais la Terre m'a rattrapée,
Comment sais-Tu que je suis là ?
Je ne sais plus vivre,
Mais la terre me prend les bras,
Et j'entre en Elle comme en moi.
Je ne sais plus vivre,
Mais la Terre creuse un sillon,
Et de mes mains, j'y entremêle la chaleur.
Le soleil a fait d'elle une étrange oraison,
S'effacent nos blessures dans le labeur,
Et je suis à genoux et deviens une sorte de pelle.
Je ne sais plus vivre,
Mais la Terre m'aime bien plus,
J'y sème mon grain,
Le secret d'une lettre,
Mes doigts goûtant à sa douceur.
Je ne sais plus vivre,
Mais la Terre me porte,
Je titube parfois,
Le corps si instable,
Mon âme épousant les ailes,
Des rayons du Ciel,
Je m'accroche aux nuages,
Ils sont de doux complices,
Je leur souris l'instant,
Dans le passage d'une brise,
Puis, voici une mésange,
L'envolée des choucas,
Le croassement des corneilles.
Je ne sais plus vivre,
Mais la terre s'enivre de nos bras,
Et je plante chaque suée de mes souvenirs,
Et je pense au moment que je tais dans le silence,
Puis, je m'envole aussi avec les choucas,
Tandis que la fourmi, et d'autres peuples de la Terre,
Me font rire comme une enfant,
Dans les trèfles d'un soupir.
Alors, je remercie la Terre,
Mes ongles devenus sa couleur,
Et je ris de nos paroles échangées,
Mon corps évanoui dans Son Mystère.



Sans regret

Illustration de Mona Biswarupa

Je me suis perdue,
Alors que je tremblais de Te perdre,
Mais, me perdre furent les Retrouvailles,
Puisque je me perdais en Toi.

Je perdais ce monde,
Je perdais ce corps,
Dans les poussières d'un entrelac,
Je rentrais chez Toi.

La peur me quitta et je jouais avec elle,
Je la regardais avec le mépris des perdants.
Quand même je haussais les épaules, lasse,
J'avançais en Toi.

J'appris du Silence des milliards de fois ;
Il tournait sans se fatiguer.
Je l'enlaçais comme ma joie ;
Entrer en Lui sans regret.

Sable

Mon frère des forêts,
Des noirs frondaisons,
Du bleu des grands nuages,
De mes prières et de mon oraison,
Du trèfle et des fétuques du près,
Dans le Ciel tendu de noir,
Par le Verbe d'une Majesté,
J'entends ce qui est Au-delà.
Ô frère des verts pâturages,
De la flûte des vents,
Des ombres et des lisières,
Pourfendant l'espace et le temps,
Une sauterelle sur un pont,
L'Echo d'une Voix, 
Des astres pleuvent sur le lait d'un cœur,
Des étoiles chantent l'Âme et La louange,
Les planètes irradient par leur clameur, 
Tandis que le frère fait le récit d'un mage :
Le Silence est un Miroir.
Mon frère du serment,
Ici débute un Voyage,
Dans la Beauté d'un Firmament,
Jamais, nous ne serons ceux qui fomentent l'outrage,
Font de leurs mots des armes,
Ourdissent des complots,
Violentent les corps et les âmes.
Nous avons dressé notre tente,
Dans le désert sans fin,
Et lors que la nuit tombe,
Nous entendons chanter le sable :
Son Silence est notre Maison,
Et il a fait basculer encore notre regard. 



Quand je ne serai plus

A l’Amour me suis liée,
Des blancs rivages qu’Il a effacés,
Aux roches vertes de nos étreintes,
Quelque rudesse de grâce,
Ecume ravie par Ton immaculé.
A l’Amour me suis baignée,
Monde jaillissant à la cime bleutée,
Quand l’Epouse poursuit l’étrange chevauchée,
Les constellations écrivent notre épopée,
Et sont-ce les voix secrètes d’Orion ?
Tandis que les sourds méprisent le Silence,
Nos ondées ont cette sagacité,
J’ai couru vers l’Exaltée,
Et mon âme, sans fin, s’y est mêlée.
As-tu existé, Ô ma folie ?
Es-tu étourdie ma Réelle ?
A l’Amour me suis liée,
Et j’emporte les moissons,
Des songes de mes nuits étoilées,
Mes mains étourdies depuis le Souffle,
Vont d’une ceinture à l’autre,
Inspectant l’océan d’étoiles.
Nous cherchons-nous, Ô douce Veillée ?
A l’Amour me suis liée,
Dans la constance de notre étonnement,
Et là où Tu es, je suis.
N’est-ce pas inouï de mourir à Ton Souffle ?
N’est-ce pas Joie de pleurer dans Tes Bras ?
N’est-ce pas bonheur que de Te connaître ?
A l’Amour me suis liée,
Hébétée, transie de froid,
Echevelée par de sidérales larmes,
Ce rang de perles au ruisseau clapotant,
Suave Alnilam, précieuse Mintaka, Ô Belle Alnitak !
Je vous vois !
Quelques senteurs à mon cœur qui bat,
Nos liens indéfectibles, votre noble Aura !
Et quand je ne serai plus,
En cette Terre Bénie,
Dans le caveau de ma folie,
Mon cœur sera rouge de notre Amour,
Baigné des lunes de nos intenses jours
Te Le dirai-je assez ?
Celui qui a aimé, celui qui a aimé,
A conquis Ciel et Terre,
Au Royaume éthéré,
Et quand le vent souffle,
L’Amant détruit palais et fausseté,
Lors qu’au milieu des ruines,
L’Amour fait jaillir fleuves et vallées,
Turquoises, opales, et mille épousées,
Aux Regards de notre intimité,
Le cœur a chanté.

Le couloir Matriciel

Tout est parfait. Quand même la cruauté côtoie le merveilleux. Tout est exactement comme le tableau le plus extraordinaire, mouvant, incessant, caressé par le vent, buriné par le sable. Dans les plus grandes épreuves, nous sommes traversés par ces faisceaux de lumière. Nous levons la tête en notre intériorité et nous fermons les yeux au plus fort de notre silence. L’hébétude est aussi une rencontre. Au commencement, le parchemin est lisse et transparent. Plus nous prenons du recul et plus nous parvenons, par la cueillette régulière des rayons du soleil, telle une plante qui s’en nourrit, à nous laisser partir, non pas avec apathie, mais plutôt avec la chaleur du foyer que l’on nous a appris à entretenir, durant toute la vie. Nous n’avons jamais considéré la vie séparée d’elle-même parce que la vie ne sépare pas. Bien au contraire, elle nous apprend et nous protège contre nous-mêmes, contre nos manquements. Il ne s’agit pas non plus de condamner, mais de regarder. Voir, c’est entendre. Chacun, nous avons nos entretiens intimes avec cette vie, celle qui est apparue en nous, efflorescente en son unité, enseignante en sa multiplicité. Nous ne défendons ni ne condamnons. La vie est beaucoup plus vaste qu’un parti-pris. La vie est un déploiement exponentiel d’états d’être.Lire la suite »

Les Roses

Distraite du monde entier,
Cordelier, ceinture de notre cordée,
Je ne vois que Toi,
Dans les crépuscules d’un monde nouveau,
Le regard en Ton Azuré.
C’est un cœur qui danse,
L’Éternité qui joue avec La Voix,
Lyre que l’on boit sans hésiter,
En gorgée de L’Êtreté.
Qui est-il, cet univers né de notre Rencontre,
Lors que savamment, Tu tisses avec ce qui est relié,
Les fuseaux de Lumière qui nous ont confié,
La Silence et Le Voyage des occultés ?
Dans l’ambre des muscs et du cœur,
Oeuvre blanche de notre Amour,
Qu’importe que soufflent les vents éparpillés,
Il est un Zéphyr suave qui nous abreuve,
Des mots de L’Essence,
Le Beau des flux de Ta Constance,
Le Printemps a chanté,
Dans les roses de Ton Baiser.

Le Cœur se contracte et depuis La Fleur éclose, en bourgeon de myriades, La Citadelle où vint s’épancher une douce tourterelle, quand du second, au rythme et au diapason, l’Un diffuse son oraison. As-tu reconnu L’Arbre argenté qui se tenant droit t’a conté les chiffres en partition ? Les notes douces et affectueuses ont posé les notes sur chaque branche. Il s’est mis à se balancer, et les nombres ont évoqué le Voyage. Ils étaient six sur l’Arbre, puis tu as dit : le septième s’impose et le voilà à se poser. Puis, l’infinitude est une boucle en spirale, le huitième est arrivé sans tarder. Quand en ton secret, tu as mandé le neuvième qui est la parfaite complétude, alors, lui de se manifester en un tire-d’aile puis a rejoint ses compagnons. Versification d’une partition qui ne s’est point achevé et chaque note, tu as noté.

Pour un songe de Toi

Résultat de recherche d'images pour "осенний пейзаж нестеров""Peinture de Mikhail Nesterov (1862-1942)

Pour un songe de Toi, en cet instant inconnu,
Dépassant le ciel ; et même la lune et le soleil,
Jamais ne sont réduits en nos mains toujours nues,
Pour la fulgurance de notre éternel Éveil,

Et l’instant survenu dans les brisures sauvages
Lors que l’océan voguait éperdu de Toi,
Miroir dont le cœur ne craint ni bourrasque ni orage,
Ni éphémère, ni même Éternité de Toi ;

Pour un songe éveillé, le corps va au-delà
Des poussières envolées, semence après semence,
Pour le seul moment surpris comme à l’insu du Roi ;

Quand jour après jour, depuis L’Aube de notre Alliance,
Tu me donnas la vision claire et me délivras
Des ignorances séculières. Je ne le regrette pas.