Peinture de Jules Aldolphe Aimé Louis Breton (1827-1906)
Je ne sais plus vivre,
Mais la Terre m'a rattrapée,
Comment sais-Tu que je suis là ?
Je ne sais plus vivre,
Mais la terre me prend les bras,
Et j'entre en Elle comme en moi.
Je ne sais plus vivre,
Mais la Terre creuse un sillon,
Et de mes mains, j'y entremêle la chaleur.
Le soleil a fait d'elle une étrange oraison,
S'effacent nos blessures dans le labeur,
Et je suis à genoux et deviens une sorte de pelle.
Je ne sais plus vivre,
Mais la Terre m'aime bien plus,
J'y sème mon grain,
Le secret d'une lettre,
Mes doigts goûtant à sa douceur.
Je ne sais plus vivre,
Mais la Terre me porte,
Je titube parfois,
Le corps si instable,
Mon âme épousant les ailes,
Des rayons du Ciel,
Je m'accroche aux nuages,
Ils sont de doux complices,
Je leur souris l'instant,
Dans le passage d'une brise,
Puis, voici une mésange,
L'envolée des choucas,
Le croassement des corneilles.
Je ne sais plus vivre,
Mais la terre s'enivre de nos bras,
Et je plante chaque suée de mes souvenirs,
Et je pense au moment que je tais dans le silence,
Puis, je m'envole aussi avec les choucas,
Tandis que la fourmi, et d'autres peuples de la Terre,
Me font rire comme une enfant,
Dans les trèfles d'un soupir.
Alors, je remercie la Terre,
Mes ongles devenus sa couleur,
Et je ris de nos paroles échangées,
Mon corps évanoui dans Son Mystère.